PME exportatrices : quelles réactions stratégiques face aux chocs exogènes ?


Les recherches de Manon Meschi, professeur de management international et stratégie à l’ESSCA, sur les effets des chocs exogènes sur les stratégies d’internationalisation des PME exportatrices, apportent des contributions managériales intéressantes. Tour d’horizon.

 

Crises économiques et financières, conflits armés et crises géopolitiques, catastrophes naturelles et climatiques, catastrophes industrielles et technologiques, catastrophes sanitaires et biologiques, attaques terroristes… Evénements à faible probabilité mais à fortes conséquences, les chocs « exogènes » ont des impacts brutaux et perturbateurs sur l’environnement opérationnel des entreprises (souvent au-delà de la zone touchée) et créent un climat d’incertitude. Ils tendent notamment à augmenter les risques et les coûts associés aux activités internationales des PME exportatrices, et influencent donc leurs décisions stratégiques sur les marchés étrangers.

 

  1. Effets systémiques des chocs et variations des réponses stratégiques des PME exportatrices

Qu’ils soient localisés ou globalisés, les chocs exogènes influencent les stratégies d’internationalisation des PME exportatrices en les amenant à redéfinir ou à réadapter leurs comportements à l’export. Cette réadaptation se traduit notamment par une reconfiguration de leur portefeuille de marchés (ensemble des marchés étrangers sur lesquels l’entreprise opère). Ces réponses stratégiques varient selon la force de l’exposition aux chocs. Dans des situations de faible exposition (par exemple des chocs très localisés ou de courte durée,), on observe une stratégie de diversification, de dispersion régionale du portefeuille de marchés, qui apporte de plus fortes capacités de flexibilité opérationnelle, et notamment la possibilité de transférer assez rapidement ses ventes d’un marché à un autre – sans coût important si la PME détient un canal de distribution sur ces marchés. Au contraire, dans des situations de plus forte exposition (par exemple des chocs d’une durée plus longue ou affectant un nombre plus important de marchés), on constate une stratégie de repli stratégique sur un nombre plus restreint de marchés, avec une concentration régionale des ventes (en termes de chiffre d’affaires) et des opérations à l’export moins étendues géographiquement.

 

  1. Prise de conscience des dirigeants et des structures d’accompagnement à l’export

Aujourd’hui, on constate un accroissement de la fréquence et de la sévérité des chocs exogènes, ayant pour effet de réduire le caractère exceptionnel de ces chocs. De plus, la mondialisation et l’interconnexion des économies contribuent à démultiplier leur ampleur et leurs effets. Au-delà de l’estimation des classiques « risques pays », traditionnellement étudiés sur les marchés étrangers, les dirigeants de PME exportatrices et les structures d’accompagnement à l’export prennent conscience de la nécessité d’être mieux préparés à des événements plus complexes, à faible probabilité et fortes conséquences, ainsi qu’à leurs répercussions « en cascade », directes et indirectes, sur les activités internationales des entreprises.

Souvent, les PME exportatrices n’ont aucun plan de gestion de choc préétabli et sont ignorées par les institutions et les pouvoirs publics, notamment en temps de crise. Grâce à une meilleure compréhension des types de chocs, de leurs effets et des réponses stratégiques à ces chocs, et grâce à une meilleure sensibilisation et à un partage d’expériences sur ce sujet, les structures d’accompagnement à l’export peuvent contribuer à la préparation organisationnelle des PME exportatrices face aux chocs.

 

  1. Développement d’outils de préparation et de gestion de l’incertitude future

Pour développer des outils de préparation aux chocs exogènes et de gestion de l’incertitude future, il est possible d’adopter une approche « garbage can view », c’est-à-dire où les solutions, sous forme d’« investissements en options réelles » (dans différentes configurations du portefeuille de marchés), préexistent aux problèmes futurs. Des « options » qui permettront de prendre les meilleures décisions stratégiques possibles et de saisir les meilleures opportunités de croissance dans des contextes de forte incertitude. 

Si l’internationalisation expose davantage les PME à différentes formes de chocs, l’exportation et les stratégies de portefeuille de marchés sont aussi un moyen pour les PME de gérer l’incertitude et les chocs, en leur offrant un large éventail d’options et de débouchés sur lesquelles l’entreprise peut s’appuyer dans ces contextes d’incertitude locale, voire mondiale.

 

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